Schéma expliquant comment le monde sportif est constitué à la base
Le corps des athlètes : (in)violable?
Rédactrice: Francesca Robitaille
Avertissement : ce texte traite d’abus physiques, psychologiques et sexuels.
Les sports sont reconnus pour apporter des bénéfices aux personnes de toutes les tranches d’âge par le biais d’effets positifs sur la santé physique [1] et mentale [2], leur permettant d’avoir confiance en leur corps et en leurs habiletés. Cette relation est cependant relative et sujette à changement. Par exemple, les développements et les découvertes scientifiques sur la performance humaine continuent à la fois de pousser les athlètes vers des exploits encore plus impressionnants, mais cela peut parfois se faire au prix de leur intégrité corporelle [3]. C’est surtout le cas quand un sport demande l’influence des entraîneurs et entraîneuses sur les décisions relatives au corps des athlètes, situation omniprésente dans les sports professionnels [4]. Dans ce texte, nous traitons de la situation particulière de l’intégrité corporelle des athlètes professionnel.le.s dans le cadre de leur travail et des problématiques actuelles et futures que cette situation engendre. Bien que nous connaissions tous et toutes l’énorme importance qu’ont la dignité et l’inviolabilité de la personne, il semble qu’il n’en soit question que lorsqu’une atteinte y est portée. De plus, les limites de ce qui peut constituer une atteinte ne sont pas toujours claires et faciles à établir. Parfois, dans le monde sportif par exemple, une tolérance relative face à certains préjudices est nécessaire pour y évoluer, autant pour les amateurs et amatrices que pour les professionnel.le.s.
La culture particulière du monde sportif
D’abord, les athlètes professionnel.le.s pratiquent souvent leur discipline sportive depuis leur enfance et sont donc habitué.e.s au contrôle grandissant exercé non seulement par le sport, mais également par les entraîneurs et entraîneuses, et ce, sur divers aspects de leur vie quotidienne. Au niveau professionnel, les décisions des entraîneurs et entraîneuses peuvent souvent exercer une influence déterminante sur les carrières des athlètes. Dans ce contexte, il n’est pas surprenant que, dans certains cas, les athlètes se taisent sur certaines atteintes pour obtenir quelques minutes de jeu supplémentaires, surtout si celles-ci ont la capacité d’allonger la durée de vie de leur carrière déjà limitée, de leur offrir la possibilité de performer aux Olympiques ou d’aller leur chercher un meilleur contrat. Cette culture d’autorité et de silence entraîne le développement d’un environnement abusif, dans le cas où une gouvernance adéquate et efficace n’est pas mise en place pour ramener la balance des forces en équilibre [5]. Cela s’est malheureusement vu plusieurs fois, notamment chez U.S.A. Gymnastics où le médecin traitant les gymnastes les a abusées sexuellement lors de compétitions et d’entraînements pendant des années avant d’être finalement condamné en 2018 [6]. Il en est de même chez les Blackhawks de Chicago de la Ligue nationale de hockey (ci-après « LNH ») où l’entraîneur chargé de la révision de vidéos des matchs a sexuellement abusé d’un joueur [7], et plus récemment, dans la Ligue nationale de soccer féminin (ci-après « NWSL ») qui a vu, en 2021, trois entraîneurs reconnus accusés d’une multitude d’inconduites [8]. Cette dernière affaire servit d’ailleurs de cas d’étude puisque le rapport sur la situation lève le voile sur des problématiques quotidiennes qui font rarement la une des journaux [9].
N'importe qui ayant assisté à un événement sportif professionnel sait qu’il s’agit d’un événement bruyant où une atmosphère de tension et d’intensité émotive règne. Il est donc parfois nécessaire pour les entraîneurs et entraîneuses de crier après leurs athlètes pour se faire entendre ou pour exprimer leur mécontentement envers une performance quelconque. La plupart des athlètes professionnel.le.s ont aussi eu, au cours de leur carrière, des expériences avec des entraîneurs et entraîneuses exigeant.e.s et difficiles à plaire. Dans ce type d’environnement, crier après les joueurs et joueuses à propos d’incidents relatifs à leur performance est considéré normal, mais c’est lorsque les propos se transforment en attaque personnelle qu’une limite est transgressée, tel qu’indiquent plusieurs joueuses de la NWSL [10]. Ces dernières soulignent la difficulté qu’elles peuvent avoir à percevoir la ligne entre des propos acceptables pour la situation et une atteinte à leur dignité [11].
La dignité
Valeur consacrée à l’article 4 de la Charte des droits et libertés de la personne [12], ainsi que traitée maintes fois en jurisprudence, il n’est pas nécessaire de s’attarder à établir l’importance accordée au droit à la dignité [13]. En droit canadien, l’arrêt Rodriguez c. Colombie-Britannique. (Procureur général) souligne la place importante du respect et de l’estime de soi dans le concept qu’une personne a de sa propre dignité. Donc, lorsqu’une personne subit une atteinte à sa dignité, elle est laissée avec l’impression que sa personne ne mérite pas la même dignité qu’autrui [14]. Dans un contexte sportif, un commentaire négatif sur une performance peut souvent être interprété comme une source de motivation pour s’améliorer et non comme un manque de respect. Toutefois, une simple reformulation de ce même commentaire pourrait le transformer en abus verbal. La problématique se trouve principalement dans la normalisation des commentaires qui frôlent la ligne du permis. Ceci peut faire en sorte que les commentaires traversant tout juste cette limite ne sont pas considérés comme étant assez graves pour mériter une plainte ou, si une plainte est faite, pour qu’une conséquence soit administrée à la personne fautive. D’ailleurs, ce fut le cas à plusieurs reprises dans la NWSL, notamment dans les équipes de Chicago et Portland [15]. De plus, la culture prévalente du « secret ouvert » selon laquelle nombreux et nombreuses connaissent la situation, sans pour autant que personne ne se croit responsable de la rapporter comme incident, a permis la normalisation autant des tirades abusives que des abus physiques et sexuels [16].
Le pouvoir de contrôle qu’ont les entraîneurs et entraîneuses et les équipes médicales sur les athlètes peut aussi faciliter l’introduction d’autres comportements ouvertement répréhensibles et portant sérieusement atteinte à l’intégrité physique des athlètes, par exemple à travers des abus physiques ou sexuels [17]. Les abuseurs et abuseuses sont fréquemment des entraîneurs et entraîneuses ou d’autres individus ayant un certain pouvoir sur l’athlète [18]. Dans le cas de l’équipe nationale de gymnastique américaine, le climat créé par l’exigence du sport et le prestige accordé aux médecins font en sorte que les victimes de Larry Nasser, médecin en chef de l’équipe, ont eu énormément de mal à signaler ses abus, sans compter toutes les autres influences qui peuvent pousser une victime à garder le silence [19].
En outre, l’influence que possède un entraîneur ou une entraîneuse achète parfois le silence de la victime. Effectivement, le rôle qui lui est accordé au sein d’une équipe et les opportunités pour l’athlète de se démarquer pour obtenir une chance d’être retenu.e par son équipe nationale ont une importance capitale pour une personne dont la carrière est limitée dans le temps par son âge et par l’inévitable déclin en performance qu’apporte la vieillesse [20]. En effet, l’âge moyen de la retraite dans les ligues majeures en Amérique du Nord est estimé à moins de 30 ans [21]. Tel que le souligne la coéquipière et confidente d’une victime, le fait de soulever ce type d’allégation met à risque la carrière de la victime [22]. L’athlète se retrouve donc sans véritable choix : accepter les atteintes à son intégrité physique et à sa dignité ou risquer sa carrière.
La NWSL : un cas d’étude
Ce déséquilibre de pouvoir en faveur des administrateurs et administratrices de l’équipe facilite la tâche à ceux et à celles qui cherchent à profiter et abuser d’autrui. Christy Holly, en tant qu’entraîneur-chef du Racing Louisville, a utilisé le prétexte de réviser des vidéos du dernier match pour commettre des attouchements sexuels sur Erin Simon, l’une des joueuses de l’équipe, en lui touchant les seins et les organes génitaux à chaque fois qu’elle faisait une mauvaise passe dans le film du match [23]. Il l’a harcelée par l’envoi de messages textes, profitant de la jeunesse et de la vulnérabilité de Simon pour forger une relation de « mentorat » qu’il pouvait par la suite exploiter, ce qu’il a fait de 2016 à 2021 [24]. Elle se trouvait donc piégée puisqu’elle se sentait redevable de sa carrière à son abuseur, et c’est ce qui a permis à Holly d’abuser d’elle même lorsqu’il n’était plus son entraîneur [25].
De plus, dans bien des cas, y compris dans la NWSL, les athlètes qui rapportent la méconduite d’entraîneurs et d’entraîneuses ou qui participent autrement à une enquête étaient échangé.e.s à une autre équipe, reçu.e.s avec scepticisme ou ridiculisé.e.s [26]. Un certain paternalisme est souvent démontré à l’égard des athlètes, prétendant qu’iels ne peuvent pas se plaindre de leur situation parce qu’iels réalisent leur rêve de jeunesse, soit de pratiquer leur sport au niveau professionnel [27]. Pourtant, peu importe le métier de rêve qu’une personne peut avoir, elle garde le droit à un environnement de travail sain et respectueux, protégé par diverses lois au travers des États [28]. Une équipe sportive n’emploie pas que des athlètes, il y a aussi des gens en administration, en finance, en marketing, etc. Ce n’est pas parce que l’objectif ultime est de gagner un championnat qu’une équipe peut tout se permettre. Rien ne devrait lui laisser croire qu’elle échappe aux lois régissant les milieux de travail.
Les implications de travailler dans un domaine hypermédiatisé et visible du grand public
Le rapport de Sally Q. Yates (ci-après « rapport Yates ») explique comment les échecs découverts dans la NWSL sont systémiques [29]. Elle capitalise sur le fait que les athlètes veulent avant tout pratiquer leur sport, sur le manque de structure clair de gouvernance au sein des entités sportives et sur la réserve dont les joueurs et joueuses doivent faire preuve lorsqu’iels s’adressent aux médias [30]. Le temps de jeu étant une priorité dans les courtes carrières d’athlètes professionnel.le.s, il n’est pas surprenant qu’une enquête ou des procédés juridiques en fasse craindre certain.e.s pour ce temps perdu. Même advenant un règlement à leur avantage, les délais de la justice peuvent être un prix trop élevé pour eux ou elles. De plus, la complexité organisationnelle des ligues, équipes et fédérations ne fait que contribuer aux difficultés éprouvées par un.e athlète voulant signaler un incident et peut créer de la confusion à l’égard de la communication de l’information [31]. L’importante présence des médias dans le monde du sport professionnel fait en sorte que l’utilisation d’ententes de confidentialité est fréquente et agit comme un outil assurant un cadre d’opération entre les parties là où le droit américain n’en prévoit pas [32]. Cependant, pour les justiciables, les règles d’application et la puissance d’une telle entente peuvent servir à faire taire les parties par crainte d’un recours entrepris à leur encontre. L’existence et la mise en place de telles ententes entre le club et l’entraîneur ou l’entraîneuse a possiblement mené, dans le cas de la NWSL, aux commentaires et références à connotation positive faits dans le cadre des départs de certains entraîneurs et entraîneuses [33]. Il est possible que cela soit fait dans le but de protéger l’équipe contre une poursuite éventuelle en diffamation de la part de l’entraîneur ou l’entraîneuse.
L’application des dispositions d’une entente de confidentialité varie entre les États, mais de manière générale, une clause empêchant un.e employé.e de rapporter la perpétration d’un crime est contraire à l’ordre public [33]. Des précédents utilisés dans des cas de lanceurs.euses d’alertes auprès des marchés financiers américains pourraient trouver application ici dans le but de rappeler que tout n’a pas sa place dans de telles ententes [34]. Par exemple, dans l’affaire de Harry Barko, ex-employé de KBR inc., l’entente de confidentialité avait été jugée trop restrictive pour les employeurs régis sous la Securities and Exchange Commission [35]. Il y a en outre le cas de Joe Macktal qui a établi le précédent pour les matières nucléaires et environnementales [36]. Ainsi, puisqu’aucun jugement en lien avec ces ententes et le mouvement #MeToo n’a été rendu à notre connaissance jusqu’à ce jour, peut-être pourrait-il être pertinent de s’appuyer sur de tels précédents? Les États ont aussi leur propre réglementation en ce qui concerne les matières relatives aux droits de l’employé.e, ce qui ajoute grandement à la confusion ressentie par la victime quant à ses droits et à ses obligations, un changement d’équipe venant modifier le droit applicable.
De surcroît, prétendre que l’entraîneur ou l’entraîneuse a quitté son poste suivant une décision mutuelle entre lui ou elle et l’équipe et qu’il n’y avait eu aucun incident n’est pas comparable à indiquer que ce même entraîneur ou cette même entraîneuse n’a pas respecté les exigences requises relatives à son comportement professionnel. Les entraîneurs et les entraîneuses, comme les athlètes, bénéficient du droit au respect de leur intégrité morale, droit protégé au Québec par l’article 35 de la Charte des droits et libertés de la personne [37]. Ainsi, adopter une approche médiatique plus conservatrice pour s’éviter une potentielle poursuite en diffamation serait une décision fort raisonnable. Dans un monde idéal, où les conséquences sont administrées par les entités gouvernantes du sport et de la ligue suivant des enquêtes complètes autonomes ainsi que par les autorités policières lorsque jugé nécessaire, tenir de tels propos défavorables dans un contexte aussi fortement médiatisé peut être considéré un cas de diffamation, même si les dires sont véridiques [38]. Cependant, la défense de l’intérêt public peut être soulevée dans certains cas où ces gens auraient commis des crimes, surtout si certain.e.s d’entre eux œuvrent aussi dans les sports de jeunesse, ce qui était notamment le cas de Rory Dames [39].
Cas particuliers : les entraîneurs-chefs et les entraîneuses-cheffes
La culture du sport professionnel crée un environnement propice à la violation des droits fondamentaux sous diverses formes. La pression de continuer à garder son corps optimisé pour la compétition, le transfert de la prise en charge de décisions entourant la santé de l’athlète vers une équipe médicale payée par l’employeur et la fréquence d’atteintes à l’intégrité physique et psychologique auxquelles l’athlète consent pour mieux performer viennent semer la confusion entre ce qui peut constituer une violation ou non. C’est aussi un contexte favorable aux conflits d’intérêts, surtout lorsque les intérêts de l’équipe et ceux l’athlète ne sont pas alignés. Une équipe pourrait utiliser la passion de l’athlète pour le ou la pousser à jouer blessé.e ou un.e médecin peut se voir incité.e à favoriser des traitements qui permettent un retour au jeu plus rapide, sans égard à la santé à long terme de l’athlète : les possibilités sont infinies [40]. Les ligues et les équipes professionnelles, comme toute entreprise, conservent précieusement leurs secrets internes à l’abri de leurs compétiteurs et compétitrices et du public. Le rapport Yates, détaillant trois cas précis d’abus dans la NWSL, lève quelque peu ce voile et permet de contextualiser les relations entre un joueur ou une joueuse et son club. Cependant, compte tenu des ressemblances dans les environnements à travers diverses ligues professionnelles, il ne serait pas surprenant de voir des cas similaires dans d’autres ligues que la NWSL. Par exemple, nous pouvons brièvement souligner les allégations contre Mike Babcock, un ancien entraîneur de la LNH [41], qui a tout de même été employé dans un rôle d’entraîneur en chef, et ce, subséquemment à la connaissance de son comportement abusif [42].
Un autre cas illustrant la prévalence de ces comportements est celui de Paul Riley qui avait été renvoyé par les Thorns de Portland suivant la conclusion d’une enquête sur des plaintes faites par certaines joueuses [43]. Cependant, publiquement, l’organisation des Thorns l’a remercié et a fait croire que le changement d’entraîneur se faisait pour des raisons de performance de l’équipe et par choix mutuel des parties [44]. Ce n’est qu’en 2021, lorsqu’un article a été publié [45] détaillant l’étendue et l’ampleur des abus commis par Riley, que ce dernier a été renvoyé de son poste d’entraîneur en chef du Courage de la Caroline du Nord – poste qu’il a pu obtenir grâce au fait qu’aucune communication de la situation n’a été faite par les Thorns ni par la NWSL ni par la Fédération de Soccer des États-Unis (ci-après « USSF »). D’autant plus que Mike Golub, un des directeurs des Thorns, n’a pas été honnête dans la référence téléphonique qu’il a donnée à propos de Riley à l’équipe qui l’embauchait [46].
Rory Dames, entraîneur des Red Stars de Chicago de 2011 à 2021, a aussi bénéficié d’une déclaration banalisant les circonstances de son départ [47], jusqu’à ce que le journal The Washington Post ne publie un article détaillant les allégations d’abus contre lui plus tard ce même jour [48]. Cet article est sorti quelques mois après celui exposant les abus de Riley.
À la différence de Riley et de Dames, les actes de Babcock avaient été rendus publics par les médias [49]. Les comportements de Riley et de Dames étaient cependant connus par leurs équipes respectives, par l’administration de l’équipe nationale de soccer féminine des États-Unis, par des officiers de la NWSL et par le conseil d’administration de cette même ligue [50]. Des enquêtes ont été faites dans la majorité des cas, mais la culture du secret entourant le fonctionnement des ligues et des équipes professionnelles est fortement enracinée. Cette culture a permis aux abuseurs de continuer à faire des victimes au travers de la ligue et du sport, perpétuant ainsi un environnement toxique. Les recours varient d’un État à un autre puisque, comme au Canada, la légifération du droit de l’emploi aux États-Unis se fait par État, à moins de travailler dans un domaine de compétence fédérale [51]. Malgré cela, il semble clair qu’en ce qui concerne le sport professionnel, l’application des lois encadrant les normes du travail et la protection des droits des employé.e.s ne sont pas efficaces et seraient caractérisées par un manque de mise en vigueur.
La responsabilité et le futur
Ainsi, nous avons vu que les situations abusives sont très peu communiquées aux haut.e.s placé.e.s des équipes, souvent par peur. Cependant, même quand l’information contenue dans une plainte est connue des administrateurs et administratrices, ce n’est aucunement une garantie qu’iels n’ignoreront pas ces informations pendant des années, comme la NWSL l’a fait avec des rapports provenant des joueuses au sujet des abus verbaux et sexuels de Paul Riley [52]. De 2013 à 2021, la ligue était informée de ces problématiques [53], et malgré le fait qu’un rapport soit soumis chaque année, ce fut le témoignage publié de Mana Shim qui rendit toute la situation connue par les médias et le public [54]. L’outrage des amateurs et des amatrices ne se fit pas attendre. Soucieux et soucieuses de supporter les athlètes, les fans se sont organisé.e.s pour amplifier les voix et les demandes des joueuses. Pour eux et elles, le sport n’est plus le même si les athlètes ne peuvent pas l’exercer dans un environnement sécuritaire et sain [55]. Les réclamations se font donc dans le sens d’exiger une plus grande transparence et responsabilité de la part du conseil d’administration de la ligue [56]. Le manque de souci pour l’intégrité et la dignité des personnes face au désir d’une équipe de gagner à tout prix reste une question pertinente au travers du monde sportif, considérant les récentes allégations entourant Hockey Canada [57].
Quoique la situation impliquant Hockey Canada ne bénéficie pas du même niveau d’informations publiquement accessibles en ce moment que le contenu du rapport Yates sur la situation dans la NWSL, on peut comprendre des interrogations et du travail des journalistes que l’organisation avait prévu et mis de côté des sommes importantes d’argent pour pouvoir régler des situations problématiques, y compris des cas d’abus et de violence sexuelle [58]. Sans présenter les mêmes caractéristiques que la NWSL, certaines problématiques, dont l’absence de gouvernance pointent vers un problème possiblement systémique au cœur du monde sportif professionnel dans son entièreté : il ne s’agit pas simplement de cas isolés [59].
Plusieurs aiment dire que la politique ne doit pas s’introduire dans le sport [60]. Pour cela, il faut d’abord remédier à toute la liste de problématiques dressée dans le rapport Yates. D’ici là, la politique et le droit demeureront présents dans le monde des sports, puisqu’avant tout, les athlètes sont des humains. N’oublions pas que tout le monde pourrait un jour être une victime.
Sources
1 : Darren E.R. WARBURTON, Crystal Whitney NICOL et Shannon S.D. BREDIN, « Health benefits of physical activity: the evidence », Canadian Medical Association Journal, mars 2006, en ligne : <https://www.cmaj.ca/content/174/6/801.full> (consulté le 12 décembre 2022).
2 : Stuart BIDDLE, « Physical activity and mental health: evidence is growing », World Psychiatry, juin 2016, en ligne : <https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4911759/> (consulté le 12 décembre 2022).
3 : Jessica L. ROBERTS, et al. « Evaluating NFL Player Health and Performance : Legal and Ethical Issues », (2017) 165-2 University of Pennsylvania Law Review, 227-314.
4: Id.
5 : Sally Q. YATES, « Report of the Independent Investigation to the U.S. Soccer Federation Concerning Allegations of Abusive Behaviour and Sexual Misconduct in Women’s Professional Soccer », octobre 2022, en ligne : <https://www.kslaw.com/attachments/000/009/931/original/King___Spalding_-_Full_Report_to_USSF.pdf?1664809048> (consulté le 12 décembre 2022).
6 : Joe HERNANDEZ, « Nassar abuse survivors reach $380 million deal with USA Gymnastics, Olympic Committee », NPR, 13 décembre 2021, en ligne : <https://www.npr.org/2021/12/13/1063798289/nassar-abuse-survivors-settlement-gymnastics-olympics > (consulté le 12 décembre 2022).
7 : Reid J. SCHAR, « Report to the Chicago Blackhawks Hockey Team Regarding the Organization’s Response to Allegations of Sexual Misconduct by a Former Coach », octobre 2021, en ligne : <https://jenner.com/system/assets/assets/11549/original/Report%20to%20the%20Chicago%20Blackhawks%20Hockey%20Team%20-%20October%202021.pdf> (consulté le 12 décembre 2022).
8 : S. YATES, préc., note 5.
9 : Id., p. 66.
10 : Frederick W. GLUCK, Stephen P. KAUFMAN et A. Steven WALLECK, « Strategic Management for Competitive Advantage », Harvard Business Review, juillet 1980, en ligne <https://hbr.org/1980/07/strategic-management-for-competitive-advantage> (consulté le 12 décembre 2022).
11 : Steph YANG, « “A fear based system” : How the structure of sports protects abusers of power », The Athletic, 1er octobre 2021, en ligne : <https://theathletic.com/2862063/2021/10/01/a-fear-based-system-how-the-structure-of-sports-protects-abusers-of-power/> (consulté le 12 décembre 2022).
12 : Charte des droits et libertés de la personne, RLRQ, c. C-12, art. 4.
13 : Québec (Curateur public) c. Syndicat national des employés de l’hôpital St-Ferdinand, [1996] 3 R.C.S. 211.
14 : Rodriguez c. Colombie-Britannique (Procureur général), [1993] 3 R.C.S. 519, p. 554.
15 : S. YATES, préc., note 5, p. 9-10.
16 : Molly HENSLEY-CLANCY, « “Nobody Cares”: NWSL players say U.S. Soccer failed to act on abuse claims against Red Stars coach », The Washington Post, 22 novembre 2021, en ligne : <https://www.washingtonpost.com/sports/2021/11/22/rory-dames-chicago-red-stars-resigns/> (consulté le 12 décembre 2022).
17 : S. YATES, préc., note 5, p. 5
18 : Saul MARKS, Margo MOUNTJOY et Madalyn MARCUS, « Sexual harassment and abuse in sport: the role of the team doctor », British Journal of Sports Medicine, octobre 2011, en ligne : <https://bjsm.bmj.com/content/bjsports/46/13/905.full.pdf> (consulté le 12 décembre 2022).
19 : DRZ TRIAL ATTORNEYS, « Why Do Some People Stay Silent About Abuse? », 31 mai 2022, en ligne : <https://drzlawfirm.com/faqs/why-do-some-people-stay-silent-about-abuse/> (consulté le 12 décembre 2022).
20 : Michelle Pannor SILVER, « Early Retirement and Resilience: THE ELITE ATHLETES », Retirement and Its Discontents: Why We Won’t Stop Working, Even If We Can, Columbia University Press, 2018, p. 91-126.
21 : RBC, « Professional athletes need a retirement game plan », rbcwealthmanagement.com, en ligne : <https://www.rbcwealthmanagement.com/en-us/insights/professional-athletes-need-a-retirement-game-plan> (consulté le 12 décembre 2022).
22 : Heather MCLAUGHLIN, Christopher UGGEN et Amy BLACKSTONE, « The Economic and Career Effects of Sexual Harassment on Working Women », (2017) Gender and Society, 333-358.
23 : S. YATES, préc., note 5, p. 129-134.
24 : Id., p. 134.
25 : Id., p. 129-134.
26 : Id., p. 129-134.
27: Id., p. 16.
28 : Iris HENTZE et Rebecca TYUS, « Discrimination and Harassment in the Workplace », National conference of State Legislatures, 12 août 2021, en ligne : <https://www.ncsl.org/research/labor-and-employment/employment-discrimination.aspx> (consulté le 12 décembre 2022).
29 : S. YATES, préc., note 5, p. 2 et 6.
30 : CBC, « Lives ruined by abuse in sports made worse by fear of retaliation, athletes say », CBC, 23 juin 2022, en ligne : <https://www.cbc.ca/radio/thecurrent/the-current-for-june-21-2022-1.6495709/lives-ruined-by-abuse-in-sports-made-worse-by-fear-of-retaliation-athletes-say-1.6498995> (consulté le 12 décembre 2022).
31 : S. YATES, préc., note 5, p. 76-78.
32 : Peter S. MENELL, « Tailoring a Public Policy Exception to Trade Secret Protection », (2017) California Law Review 105, 1-63.
33 : S. YATES, préc., note 5, p. 8 et 11.
34: Macktal v. Brown & Root, Inc., 86-ERA-23 (ARB Jan. 6, 1998); Order instituting cease-and-desist proceedings pursuant section 21C of the Securities Exchange Act of 1934, making findings and imposing a cease-and-desist order, April 1 2015, Administrative Proceeding File No. 3-16466, en ligne : <https://kkc.com/wp-content/uploads/2019/06/barko_sec-order.pdf> (consulté le 12 décembre 2022).
35 : Order instituting cease-and-desist proceedings, préc., note 34.
36 : Macktal v. Brown & Root, Inc., préc., note 34.
37 : Charte des droits et libertés de la personne, préc., note 12, art. 35.
38 : Lamarre c. Allard, 2008 QCCS 5266, par. 87.
39 : S. YATES, préc., note 5, p. 9.
40 : Drew A. HYLAND, « Playing to Win: How Much Should It Hurt? », The Hastings Center Report 9-2, avril 1979, p. 5-8.
41 : Jackie DUNHAM, « Chris Chelios alleges Mike Babcock verbally assaulted Red Wings teammate », CTV News, 4 décembre 2021, en ligne : <https://www.ctvnews.ca/sports/chris-chelios-alleges-mike-babcock-verbally-assaulted-red-wings-teammate-1.4714567?cache=yes%3Fautoplay%3Dtrue%3FclipId%3D89530> (consulté le 12 décembre 2022).
42 : Adam GRETZ, « Mike Babcock hired as head coach at University of Saskatchewan », NBC, 20 février 2021, en ligne : <https://nhl.nbcsports.com/2021/02/20/mike-babcock-hired-as-head-coach-at-university-of-saskatchewan/> (consulté le 12 décembre 2022).
43 : S. YATES, préc., note 5, p. 70-73.
44 : Id., p. 65-68.
45 : Meg LINEHAN, « “This guy has a pattern”: Amid institutional failure, former NWSL players accuse prominent coach of sexual coercion », The Athletic, 30 septembre 2021, en ligne :
<https://theathletic.com/2857633/2021/09/30/this-guy-has-a-pattern-amid-institutional-failure-former-nwsl-players-accuse-prominent-coach-of-sexual-coercion/> (consulté le 12 décembre 2022).
46 : S. YATES, préc., note 5, p. 74.
47 : Id., p. 124-125.
48 : M. HENSLEY-CLANCY, préc., note 16.
49 : A. GRETZ, préc., note 42.
50 : S. YATES, préc., note 5, p. 76-78.
51 : The Whistleblower Protection Act, 5 U.S.C. § 2302 (b)(8).
52 : S. YATES, préc., note 5, p. 77-87.
53 : Id., p. 65-68.
54 : M. LINEHAN, préc., note 45.
55 : Leo BAUDHUIN, « How Portland Thorns fans balanced protest and support for the NWSL semifinal », The Athletic, 24 octobre 2022, en ligne :
<https://theathletic.com/3725792/2022/10/24/portland-thorns-fan-protest-nwsl/> (consulté le 12 décembre 2022).
56 : Julian MCKENZIE, « Hockey Canada timeline: Organization maintained third reserve fund for uninsured claims », The Athletic, 20 juillet 2022, en ligne : <https://theathletic.com/3437209/2022/07/20/hockey-canada-lawsuit-investigation-timeline/> (consulté le 12 décembre 2022).
57 : Id.
58 : Id.
59 : Ashley BURKE, « Ex-Supreme Court justice says Hockey Canada’s handling of funds used to pay sexual assault claims was flawed », CBC, 13 octobre 2022, en ligne : <https://www.cbc.ca/news/politics/report-commission-hockey-canada-uninsured-losses-1.6614566 > (consulté le 12 décembre 2022); S. YATES, préc., note 5, p. 157-161.
60 : À titre d’exemples : https://www.newstbt.com/post/opinion-politics-has-no-place-in-sports et https://www.theguardian.com/commentisfree/2021/jun/13/impossible-to-keep-politics-out-of-sport-just-as-it-should-be (consultés le 12 décembre 2022).